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Tant que n'Aura Soleil
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14 février 2011

Lundi cordonnier

001

Quand les esclaves chaussèrent la liberté...

Faire le "lundi cordonnier" à Maurice, c'est prolonger indûment le week-end et, la tradition veut, que ce soit pour aller à la pêche. Ce "lundi cordonnier" aurait pour origine un jour de repos que se seraient octroyé les cordonniers, savetiers et autres  spécialistes du cuir qui avaient du faire face à une demande de 56750 nouvelles paires de chaussures neuves pour équiper les "apprentis" qui, le Dimanche de Pâques (31mars 1839), passaient enfin au statut d'homme libre.

  La décennie de L'Abolition (1830-1840) est une période importante dans l'histoire sociale de Maurice. Elle marque l'accès des Noirs à la dignité et à la liberté, que l'esclavagisme leur avait déniées, sur une terre de rêve devenue colonie à sucre de l' Empire britannique;

   Les colons franciliens montrèrent une hostilité farouche à l'émancipation inéluctable des esclaves. Leur véhéménce se cristallisera sur deux articles emblématiques devant être accordés aux esclaves : le port d'un patronyme et le port des souliers, deux attributs propres à l'humain.

    Même pendant la période transitoire de l'apprentissage(1835-1839) cette revendication symbolique du port des souliers ne sera pas satisfaite.

      Tout celà explique la nécessité pour chaque esclave d'avoir des souliers, enfin, pour ce dimanche de Pâques 1839 jour de l'abolition. Je laisse la parole à Amanda Devi qui a très bien relaté, avec beaucoup de lyrisme, ce qu'avait du être cette journée.

     " Ce matin-là, ils mirent leurs chaussures avec une révérence de messe basse, au milieu du silence conjugué d'une poignée de maîtres ironiques ou meurtris, méprisants ou sincèrement attristés. Et, les semelles vierges de toute souillure claquant fièrement sur les sols de pierraille, les dalles des allées menant vers les maisons des propriétaires, les chemins de terre battue, durcis par tant d'années de service, tant de sécrétions organiques leur faisant une carapace lisse et polie, ils se mirent tous en route, des milliers et des milliers d'apprentis qui tournaient ce jour-là le dos aux propriétés, une marée ingambe provenant des quatre coins de l'île et dont les pas, résonnant de concert, semblaient entonner un furieux "magnificat" au rythme lancinant"

             "Ils étaient tous sur le chemin." 

      Contrairement à ce qu'avait craint les maîtres cette émancipation des esclaves se passa sans heurt. Evidemment, de nombreux affranchis, qui avaient trop souffert, abandonnèrent les plantations et ce sera l' "Engagement" d'ouvriers libres que l'on ira chercher au sud de L'Inde et qui viendront travailler la canne.

      J'ai raconté cette histoire du symbole des chaussures chez ses ancêtres à Matteo pour le dissuader de partir nus-pieds, même vers la plage. Ais-je été entendu?

     Ces renseignements sont tirés d'un livre très émouvant "Les souliers de l'Abolition" d'Alain Romaine.

     Pour les Lugosiens, intéressés par l'île Maurice, je vous signale qu'il y a, à la bibliothèque, plusieurs livres s'y rapportant, dont ceux d'Amanda Devi, que Christiane se fera prochainement un plaisir de vous  prêter.

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